Russie, Etats-Unis, Chine et Iran : quatre pays pour deux visions du monde

L’Assemblée générale de l’ONU a vécu son moment fort ce lundi. Les chefs d’Etats se sont succédés à la tribune pour livrer leurs visions face à un monde au bord de l’explosion. La division Occident-Orient a atteint son paroxysme.

Un monde coupé en deux. Deux visions. Des argumentaires aux antipodes. La tribune de l’ONU a été, plus que jamais, le théâtre d’une fracture entre grandes puissances. D’un côté, l’Occident et son porte-étendard américain. De l’autre, la Russie, la Chine et l’Iran. Tous représentés par leurs leaders respectifs. Face aux dangers et aux conflits qui frappent la planète, la parole a été centrée. Mêmes sujets, réponses différentes.

Obama ou les Etats-Unis en parangon de la démocratie

Le locataire de la Maison Blanche ouvre le bal. Un discours qui démarre par rappeler les décennies de conflits terribles ayant frappés le monde depuis 70 ans. Le leader de la première puissance mondiale se satisfait d’un «travail presque complet». Lequel ? «Celui de la marche du progrès humain». Presque, car le président américain rappelle que le danger provient de ceux qui «répandent la désinformation, assassinent les dissidents, et radicalisent la jeunesse».

Barack Obama s’est fait l’écho des débats qui agitaient jadis son pays et que certains, outre-Atlantique, voient comme un menace. Une Chine qui s’éveille, une Russie qui renaît, un Iran révolutionnaire et un islam incompatible avec la démocratie. S’il clame «ne pas vouloir retourner à l’époque des conflits d’antan», il se fait plus vindicatif quand il s’agit de remémorer au monde, la puissance militaire américaine : «La plus grande que le monde ait jamais connu et je n’hésiterai pas à m’en servir pour protéger mes alliés». Ambiance.

S’il admet croire qu’il n’en aura guère besoin, le discours se muscle quand il en vient à Bachar el-Assad. Le président américain met un peu d’eau dans son vin quand il évoque le fait «d’être prêt à travailler avec la Russie et l’Iran» sur la question syrienne. Avant de revenir à sa lecture des faits. Une protestation légitime du peuple, réprimée dans le sang. Une accusation sur les attaques à l’arme chimique du régime plus tard et la position américaine s’exprime de plus belle : Assad ne peut pas rester au pouvoir.

Le président américain revient également sur la situation en Ukraine. Une révolte populaire contre le pouvoir en place. Dans la vision américaine, pas de place à l’interrogation. Le référendum «illégitime» en Crimée et son «annexion» par la Russie justifie les sanctions. Il qualifie la politique du Kremlin en la matière de vue comme «une résurgence de la Russie», «une position partagée par un certain nombre de commentateurs et de politiques aux Etats-Unis». Le message est passé.

Le leader américain a également un mot pour la Chine. Selon lui, aucune réclamation territoriale des Etats-Unis en mer de Chine. L’empire du milieu se doit de laisser la libre circulation de navigation et laisser tourner le commerce mondial. «Des lois internationales» et des «principes» que les Etats-Unis «défendront».

Poutine pour un ONU mieux adapté au monde d’aujourd’hui

«L’ONU a toujours connu des différents. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France, la Chine et la Russieont toujours utilisés leurs droits de véto. Tout est une question de vision. Toute est une question de compromis.» Par ces mots, le discours du leader russe prépare un tout autre exposé. Celui d’un ONU obsolète qui doit s’adapter à un monde devenu multipolaire. Il rappelle que l’organisation internationale, une fois la guerre froide terminée, n’a cessé de se mettre du côté du centre de décision mondial. Une allusion à peine voilée à la puissance de Washington.

Vladimir Poutine souligne le danger de vouloir imposer l’idéologie de la «démocratie» à l’occidentale à travers la planète et prend même comme exemple les «tragiques conséquences» de l’URSS. Le locataire du Kremlin en profite pour rappeler que nombre des terroristes qui frappent actuellement le Moyen-Orient trouvent leur genèse dans l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis en 2003, que les djihadistes ayant trouvé un terreau propice dans une Libye en proie au chaos ne cessent de garnir leurs rangs et souligne l’échec de la stratégie américaine en Syrie.

Il rappelle que la Russie a toujours combattu le terrorisme et fournit aujourd’hui des armes à l’armée syrienne de Bachar el-Assad, «la seule, avec les kurdes, qui combatte vraiment le terrorisme». Poutine se pose en pragmatique. Il appelle à une grande coalition «incluant les pays arabes» afin d’affronter l’Etat islamique. «Joindre nos forces, comme lors de la lutte contre Adolf Hitler.» Voici le credo du leader russe. «La Russie sera bientôt à la présidence du Conseil de sécurité de l’ONU, alors nous analyserons les menaces, discuterons de la manière de les combattre et coordonnerons nos forces contre Daesh. Tout cela dans les règles de la charte de l’ONU».

Le chef du gouvernement russe rappelle le danger du retour à une guerre froide, «voulu par certains de nos collègues». Il fustige le récent déploiement militaire de l’OTAN en Europe et les sanctions contre l’économie russe. «Le but de l’économie est de servir l’intérêt de tous» déclare-t-il. Il a également un mot pour la situation mondiale : «Les règles du jeu semblent avoir changé pour le bénéfices d’un petit groupe. Ceci pourrait faire s’écrouler l’économie internationale.»

Vladimir Poutine souligne également sa volonté de construire les alliances économiques de demain.Notamment avec la Chine. Sur le climat, le président russe s’engage à réduire «significativement les émissions de gaz à effet de serre» et appelle à la tenue d’un «forum des Nations Unies sur le changement climatique et les ressources naturelles».

Xi Jinping et un monde multipolaire

Le leader de la deuxième puissance économique mondiale monte à la tribune pour faire écouter au monde la symphonie d’un monde nouveau. Un monde dont les centres économiques et décisionnels penchent vers l’Orient.

«Toutes les nations du monde, interdépendantes aujourd’hui, partagent un futur commun. Nous avons besoin d’une nouvelle charte des Nations Unies, créée ensemble pour un avenir nouveau.» Par ces mots, le chef du gouvernement chinois pose les bases d’un ordre mondial au sein duquel les cartes sont rebattues. Il appelle à «bâtir des partenariats d’égaux à égaux» et à respecter «la souveraineté et la compréhension». Là encore, une allusion à peine voilée à l’ingérence occidentale.

Xi-Jinping appelle également à cesser les mentalités nostalgiques «de la guerre froide» et prône une approche «commune» pour gérer les conflits. Il fait également référence à l’économie mondiale et au dangereux «écart» qui se creuse à travers riches et pauvres à travers le globe.

Hassan Rohani et l’union sacrée contre le terrorisme

Le chef de l’Etat iranien se satisfait qu’un «nouveau chapitre» se soit ouvert entre son pays et le reste du monde grâce à l’accord sur le nucléaire. Mais il se fait plus inquiet lorsqu’il s’agit de la situation en Syrie. S’il fait, à nouveau, part de sa volonté d’aider à «rétablir la démocratie» en Syrie, il appelle à une union sacrée contre le terrorisme.

«La plus grave menace contre le monde aujourd’hui est que des organisations terroristes parviennent à créer des Etats terroristes», dit-il, regrettant que «les soulèvements nationaux au Moyen-Orient soient détournés par les terroristes et que le destin des nations soit déterminé par les armes et la terreur plutôt que par les bulletins de vote».

L’occasion de lancer une invitation «au monde entier» à «constituer un front uni contre l’extrémisme et la violence» et de rappeler «l’échec» de la coalition internationale en Irak et Syrie.

 

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