Les journalistes tunisiens: « notre liberté, une ligne rouge »

Face à la récurrence des menaces et des agressions physiques et morales, les journalistes tunisiens, à travers les différentes régions de la République, ont décidé de faire de ce vendredi 02 février 2018, une journée de colère, en réponse aux appels de leurs collègues ainsi que des institutions représentant le secteur et à leur tête le Syndicat National des Journalistes Tunisiens, la Fédération Tunisienne des Directeurs de Journaux et l’Union Générale Tunisienne du Travail et le Forum tunisien des Droits Economiques et Sociaux.
 
Un mouvement de protestation a eu lieu ce matin, à partir de 11 heures, devant les locaux du SNJT. Les journalistes, ont été nombreux à répondre présents à cette manifestation, dont le seul objectif est de défendre la dignité du secteur. Portant le fameux brassard rouge, l’ensemble des journalistes « en colère« , ont crié haut et fort ; « il est pas question de nous intimider et de toucher à notre unique acquis, notre liberté« .
 
Neji Bghouri: Non au retour de l’Etat policier…
 
Le président du SNJT, Neji Bghouri,  entouré des membres du bureau exécutif du syndicat avec à ses côtés du président de la FTDJ, Taieb Zahar, le porte parole du Front Populaire Hamma Hammami, et le secrétaire général adjoint de l’UGTT, Samir Cheffi, a prononcé un bref discours à cette occasion. Ému par la présence massive, ce matin, des journalistes, Neji Bghouri a affirmé que le SNJT a décidé de continuer à tirer la sonnette d’alarme tant que des abus et des agressions sont toujours commis à l’encontre des professionnels du métier.  « Aujourd’hui, vous n’êtes pas ici pour protester contre votre situation professionnelle, généralement marginalisée, mais plutôt pour défendre votre liberté d’expression, le seul acquis de la révolution. Nous avons dit précédemment qu’il n’est pas question de laisser grandes ouvertes les portes devant la répression sous couvert de la religion. Mais aujourd’hui, nous disons, il n’est pas question de laisser les portes grandes ouvertes devant la répression sous couvert de la sécurité. Non au retour de l’Etat policier… Nous les journalistes, nous ne défendons pas un droit propre à nous, mais nous défendons les droits, la dignité et la liberté de tout le peuple tunisien. Dans ce pays, si nous sommes aujourd’hui fiers de quelque chose, ça ne sera sans doute pas une puissante économie, mais plutôt la marge de liberté d’expression dont nous jouissons. » a-t-il lancé. Et d’ajouter: « Malheureusement, cette liberté est aujourd’hui menacée au moment où le ministre de l’intérieur promet de poursuivre ou de surveiller tout journaliste ayant critiqué l’institution sécuritaire, ou encore quand le ministre de l’intérieur défend des milices appelant à la torture et au viol. Ceci est la plus grande menace« .
 
Taieb Zahar: non au retour des anciennes pratiques
 
De son coté, Taieb Zahar, directeur de la FTDJ, a rappelé à Réalités Online que l’ensemble des institutions représentant le secteur du journalisme en Tunisie, mènent depuis plusieurs années un combat commun pour défendre la liberté d’expression et le pluralisme médiatique. « Notre combat n’a pas commencé aujourd’hui. Nous nous sommes engagés depuis 4 ans dans la défense de l’entreprise de presse, et ainsi l’emploi. C’est un combat commun, que nous menons aux cotés du SNJT. La situation est devenue aujourd’hui très grave.
 
Outre les problèmes financiers que connait actuellement le secteur et les revendications toujours non honorés par l’Etat, on constate aujourd’hui un retour en force des pratiques de l’ancien régime et c’est dans ce cadre que cette journée de colère a été observée. Les journalistes ne sont pas en colère contre leur situation matérielle, mais ils sont là, plutôt, pour défendre la liberté d’expression  gravement menacée par les pratiques du ministère de l’intérieur. » a-t-il lancé. Et d’ajouter: » Nous ne sommes pas en train de condamner l’ensemble de l’institution sécuritaire qui joue un rôle assez important, mais nous condamnons les pratiques de certains qui se permettent d’attaquer les journalistes et d’inciter à leur agression. Les récentes déclarations du ministre de l’intérieur, les déclarations troublantes du chef de l’Etat qui a émis un jugement grave sur le reportage effectué en Tunisie par un journaliste étranger, toutes ces pratiques nous rappellent celles de l’ancien régime. En tout cas il n y a pas pire pour l’image du pays que de  faire ce genre de déclarations ou d’agir de la sorte. »
 
En ce qui concerne la participation de certains partis politiques, à cette manifestation, Taieb Zahar a affirmé que la défense de la liberté d’expression est le devoir de tout le monde. « Tous ceux qui défendent sincèrement la liberté de la presse et d’expression sont les bienvenus. Ce qui importe le plus c’est de préserver la neutralité de la FTDJ et du SNJT et d’éviter d’entrer dans aucun jeu politique partisan. » a-t-il conclu.
 

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