Tunisie : Ces partis qui vont modifier le rapport des forces .. Par Brahim Oueslati

Le paysage politique connait ces derniers temps des chambardements sans précédent. D’éclatement en fusion et de l’émergence de certains partis à la déliquescence d’autres. Avec la montée d’une rhétorique populiste sur fond de sentiments antiélitiste et antisystème, et dont les auteurs s’auto proclament porte-paroles des petites gens.

L’ensemble des formations politiques identifiées comme étant partie prenante de ce système sont aujourd’hui en échec. La crise qui touche tous les domaines de la vie des Tunisiens est imputable à ces partis qui n’ont pas réussi à se hisser au niveau des attentes des citoyens et ont trahi leurs électeurs. A des degrés divers, la responsabilité de la situation que vit actuellement le pays est partagée entre les formations politiques qu’elles soient représentées au sein du gouvernement ou qui sont dans l’opposition.

Des partis en déphasage…

De l’éclatement de Nidaa Tounes, à l’implosion du front populaire et au repliement d’Ennahdha, les trois principales forces politiques de l’actuelle législature se trouvent en difficulté. Les trois formations ont pour point commun d’être dirigés par de veux routiers de la politique qui sont là depuis des décennies. Le parti de Béji caid Essebsi, miné par les dissensions internes et la guerre des clans, a fini par éclater en plusieurs particules. Alors que l’implosion du groupe parlementaire du Front populaire a du coup mis à nu une unité de façade. De son côté, le mouvement de Rached Ghannouchi, s’il se maintient, il est, par contre, affaibli par l’épreuve du pouvoir et plus tard par l’affaire de l’appareil secret, ébranlé par la conjoncture régionale, notamment le conflit inter libyen. Il a flanché par moments mais il n’a pas plié.

Et alors que les formations qui ont dominé la scène au cours des huit dernières années semblent ne plus être en phase avec les attentes des Tunisiens, de nouveaux partis politiques émergent. Ils ont pour ambition de proposer de nouvelles idées et comptent bien se poser comme alternatives à ces formations. Et ont pour particularité d’être dirigés par des personnalités beaucoup plus jeunes que les dirigeants des trois partis précédemment cités et qui se sont imposés après le 14 janvier 2011. Leur émergence a perturbé l’équilibre déjà fragile et va certainement modifier le rapport des forces.

Le Pdl qui dérange

 La meilleure illustration est celle du Parti destourien libre qui s’impose de plus en plus comme un élément incontournable dans le paysage politique. Sa présidente, la quadragénaire Abir Moussi, a réussi là où tous les ténors de l’ancien régime ont échoué : monter une formation politique se réclamant de l’héritage destourien de Bourguiba, sans renier celui de l’ancien RCD dont elle était secrétaire général adjoint pendant juste une année, de janvier 2010 à janvier 2011. Et contrairement à beaucoup d’autres, elle assume le droit d’inventaire. Le parti recrute parmi « les destouriens qui ont mal, déclare-t-elle, parce qu’ils se sont tus ou ont été humiliés et qui veulent retrouver leur maison et leur identité », les indépendants qui n’ont jamais fait de politique ou qui comptent un ascendant destourien ; une partie des déçus de la gauche « qui ne joue pas son rôle et a toujours été ambiguë », les anciens commis de l’État ; les familles des sécuritaires, les femmes, comme elle l’a expliqué dans Jeune Afrique. Si l’on croit les sondages d’opinions, le Pdl qui poursuit le siphonage de l’électorat destourien, pourrait damer le pion aux partis de l’actuelle coalition gouvernementale et en premier lieu Ennahdha. Alors que Moussi l’inlassable chantre de la fin de « l’hégémonie islamiste » est une candidate sérieuse à l’élection présidentielle.

Le Courant démocrate qui monte

A côté du Pdl, un autre parti est en train de se frayer un chemin parmi les « grands ». C’est le courant démocrate qui a fait de la guerre contre la corruption son cheval de bataille. Dominé par les époux Abbou, Mohamed et Samia, il ambitionne, à son tour, de poursuivre sa lancée et se mettre en pole position à la veille des scrutins législatif et présidentiel. Mohamed Abbou qui a récupéré son poste de secrétaire général au cours du dernier congrès, a déjà annoncé sa candidature à l’élection présidentielle. Il entend siphonner l’ancien électorat du congrès pour la république, Cpr, dont il fut à un certain moment secrétaire général aux côtés de son président Moncef Marzouki.

Al Badil qui perce

Un autre parti commence à s’imposer quoique difficilement. « Al Badil ettounsi», la formation de l’ancien chef du gouvernement Mehdi Jomâa ambitionne de lutter contre l’éparpillement politique. Après avoir fusionné avec « Tounes Awalan », un parti né, à son tour, de la cuisse de Nidaa Tounes, il a engagé des pourparlers avec d’autres formations comme Nidaa Tounes, Mashrou Tounes ou encore Tahya Tounes. Sans résultats concrets. Pour Jomaa qui évoque souvent son bilan à la tête du gouvernement des technocrates, en 2014, jugé positif, « il n’est plus question de continuer à gérer le pays comme on l’a géré dans les années 1960 et 1970 », a-t-il confié à l’hebdomadaire Jeune Afrique. Il promet de s’attaquer aux « problèmes économiques, sociaux et aux déséquilibres régionaux ». Son parti qui compte dans ses rangs un bon nombre de compétences ayant fait leurs preuves dans des institutions internationales comme dans le gouvernement, peine, par contre, à s’imposer comme une alternative fiable à l’actuel système.

Les partis politiques qui sont au nombre de 218, nouveaux comme anciens, sont face à eux-mêmes. Qu’ont-ils à présenter si ce n’est des promesses qui n’engagent que ceux qui les croient. S’ils entendent jouer un rôle dans l’avenir, ils doivent s’adapter aux nouvelles donnes. Ce n’est pas un choix mais une contrainte.

 

 

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