Prolifération des armes de destruction massive : L’Algérie veut préserver la région Mena et le Sahel

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L’élection de l’Algérie, vendredi dernier, au poste de vice-présidente de la 27e session de la Conférence des Etats parties de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques intervient dans le sillage de son plaidoyer en faveur de l’élimination des armes de destruction massive dans la région MENA (Afrique du Nord et Moyen-Orient), le Sahel et la Méditerranée.
Pour le Dr Arslan Chikhaoui, expert en géopolitique et membre du Conseil consultatif d’experts du World Economic Forum, «la position de l’Algérie sur le désarmement nucléaire et la prolifération des armes de destruction massive (ADM) devrait être comprise dans le contexte de son engagement en faveur de la non-prolifération nucléaire et de la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord et dans la région du Sahel». Mais, aussi, «dans le cadre du développement de son programme nucléaire purement civil», ajoute-t-il.
Il rappelle que l’Algérie est engagée dans la lutte contre le financement, l’acquisition et la diffusion de ces armes. Sa position est, selon lui, «liée à un certain nombre de raisons historiques et politiques, sachant que l’Algérie a souffert et continue de souffrir des effets des essais nucléaires français au Sahara qui ont eu lieu jusqu’en 1966 et des mines antipersonnel disséminées par l’administration coloniale, depuis 1956, à travers les lignes de défense Morice et Challe le long des frontières avec le Maroc et la Tunisie».
De plus, renchérit-il, «bien que non couverts par les conventions sur les ADM, les Algériens ont subi des attaques avec des armes chimiques incendiaires (napalm) pendant la guerre de Libération et au cours des années 1990, des organisations terroristes ont tenté d’utiliser des agents biologiques pour contaminer les barrages et châteaux d’eau du Centre du pays».
Il est clair, poursuit l’expert, que «la non-prolifération des ADM dans la région Mena et Sahel est dans l’intérêt de l’Algérie». D’ailleurs, «le gouvernement avait examiné, en décembre 2020, la création d’un comité national d’évaluation des risques de financement de la prolifération des armes de destruction massive, du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme».
Cet outil réglementaire et technique doit, soutient-il, «permettre à l’Algérie d’atteindre les standards internationaux car elle a ratifié la Convention sur les armes biologiques et toxines (BTWC) signée en 1975, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (NPT) signé en 1995 et la Convention sur les armes chimiques de 1995 et met en œuvre les recommandations du Groupe d’action financière internationale (GAFI)».
Prise de conscience
Chikhaoui, se référant à certaines sources publiques, précise que la première tentative d’attaque en Algérie, en 1994, visait à contaminer les réservoirs d’eau potable à l’aide de la toxine botulique. «Cette information vient corroborer plusieurs rapports d’organisations internationales et de think tanks indiquant que les filiales d’Al Qaïda ont fait de multiples tentatives de manipulation de poisons, de gaz, d’agents biologiques et de matières radioactives et qu’elles disposeraient de camps de formation spécialisés dans le domaine biologique et chimique», souligne-t-il. Les autorités algériennes sont restées vigilantes face au terrorisme chimique, biologique, radiologique et nucléaire (CBRN) précisément parce que, estime-t-il, «l’Algérie a été confrontée à des dangers». Cependant, déplore l’intervenant, «par rapport au domaine nucléaire, les contrôles nationaux de matières biologiques et chimiques sensibles demeurent insuffisants». Il souligne, néanmoins, qu’«il existe déjà un contrôle obligatoire de qualité sanitaire assuré par des agences nationales et internationales spécialisées réglementant l’importation et l’exportation de produits alimentaires et pharmaceutiques, et le renforcement des capacités préventives, scientifiques et judiciaires pour lutter contre la menace de prolifération chimique et biologique des réseaux VEO devra certainement continuer à évoluer».
Avec sa stratégie de diversification de son économie prônant le développement industriel, il assure que «l’Algérie va devoir incontestablement compléter son corpus réglementaire pour empêcher l’éventuelle acquisition par des VEO d’armes biologiques et chimiques». Pour Dr Chikhaoui, «les multiples décisions laissent entendre que notre pays se penche sur cette situation pour le renforcement des capacités dans ce domaine avec l’établissement de lois et de réglementations concernant la mise en œuvre de l’importation, l’exportation, la détention, l’achat et le transport d’agents pathogènes et de toxines».
«La menace de bioterrorisme, décrite comme une menace de troisième génération, est prise en compte», ajoute-t-il. «L’Algérie estime, cependant, que la réponse doit être coordonnée et mobilise par conséquent un large éventail de ressources humaines et matérielles et implique plusieurs acteurs». «La création d’une zone exempte des ADM dans la région Mena et au Sahel est un principe partagé et l’Algérie soutient toute initiative qui chercherait à étendre une telle zone si cela était jugé utile par tous les États», soutient-il.
Assia Boucetta
Menaces chimique, biologique, radiologique et nucléaire : Appel à une coopération internationale
L’Algérie n’a eu de cesse de mettre en garde contre les menaces chimique, biologique, radiologique et nucléaire (CBRN). Ainsi, il ressort des différentes déclarations dans les fora internationaux que l’Algérie entend renforcer le développement de la coopération internationale et régionale sur les points suivants: mise en place de la législation et la réglementation nécessaires pour prévenir et combattre les risques et accidents nucléaires, biologiques et chimiques conformément aux normes de défense CBRN, renforcement des capacités en réponse à une attaque malveillante CBRN potentielle et sensibilisation à l’importance du principe 3S (sûreté, sécurité et sauvegarde). «L’Algérie consciente que la région Mena et du Sahel présente un environnement politique complexe pour le contrôle des armes CBRN. Cependant, il existe un terrain commun pour des échanges et la coopération. Il est par conséquent indéniable que l’Algérie soutient le potentiel de dialogue régional de la Conférence d’Helsinki proposée et, en tant qu’Etat de la région Mena, Sahel et Méditerranée, elle participe à promouvoir une zone de sécurité et de sûreté régionales», souligne le Dr. Arslan Chikhaoui, expert en géopolitique et membre du conseil consultatif d’experts du World Economic Forum. La diplomatie scientifique, héritage des quatre sommets sur la sécurité nucléaire, demeure un élément-clé de la sensibilisation aux menaces liées aux ADM.
A. B.

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