L’Algérie et la Tunisie auraient noué un deal secret : Slimane Bouhafs en échange de Nabil Karoui

La Tunisie, un pays supposément démocratique, aurait noué un deal secret avec le régime algérien qui pourchasse les opposants et traque les militants qui ne partagent pas ses valeurs au-delà des frontières du pays.  Selon plusieurs sources algériennes et tunisiennes concordantes, ce deal concerne un échange programmé qui permet à l’Algérie de récupérer Slimane Bouhafs, l’un des militants les plus influents du Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK), en contrepartie de la remise prochaine aux autorités tunisiennes de l’opposant Nabil Karoui. 

L’homme d’affaires, magnat des médias et chef du parti Qalb Tounes, Nabil Karoui, a été effectivement arrêté hier dimanche en compagnie de son frère le député Ghazi Karoui, selon des sources désormais officielles en Algérie. Ils doivent comparaître ce matin lundi devant le tribunal de Tébessa. Leur extradition rapide vers la Tunisie est pour beaucoup de sources sécuritaires et judiciaires contactées par Algérie Part « plus que probable », voire « certaine » et elle devrait avoir lieu dans les prochains jours.

Des sources concordantes révèlent que l’arrestation des deux frères aurait eu lieu à Tébessa, une ville située à l’est du pays, près de la frontière algéro-tunisienne, à quelques kilomètres de Kasserine.  Ils se trouvaient dans un appartement situé dans une zone résidentielle du centre-ville. Ils auraient été logés par un homme d’affaires originaire de Tébessa qui serait impliqué dans leur opération d’entrée clandestine sur le territoire algérien. Cet homme d’affaires sera, d’ailleurs, lui-aussi présenté devant les magistrats.

Ces derniers devront s’appuyer sur l’accord de coopération judiciaire entre l’Algérie et la Tunisie pour trancher sur le sort de Nabil Karoui, l’un des rivaux les plus actifs de l’actuel Président tunisien, Kais Saied.  Propriétaire de la chaîne tunisienne Nessma et président du parti Qalb Tounes, Nabil Karoui avait été libéré le 15 juin dernier après six mois en détention en Tunisie pour une affaire de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale.

Il n’était pas apparu en public depuis le coup de force du Président Kaïs Saïed, en juillet, lorsque ce dernier a décidé de suspendre le Parlement et de limoger le Premier ministre, Hichem Mechichi. Selon plusieurs sources tunisiennes, Kais Saied s’apprêtait à le remettre en prison pour le neutraliser définitivement.

En parallèle, les autorités tunisiennes ont remis à l’Algérie dans des conditions troublantes l’activiste Slimane Bouhafs. Ce dernier a été arrêté le mercredi 25 Aout en Tunisie et se trouve depuis la nuit du 28 au 29 Aout, dans les locaux de la police à Alger où il est placé en garde à vue en attendant sa présentation devant le tribunal Sidi M’hamed à Alger, certifient plusieurs sources policières.

Slimane Bouhafs s’est réfugié en Tunisie depuis 2018 où il s’est rapproché du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) pour demander le statut de réfugié politique. Lors de son arrestation, « tous ses papiers ont été confisqués, sauf la carte de l’UNHCR », a déclaré fille Thilelli à plusieurs médias algériens tout en affirmant qu’elle ignore encore l’identité des agents ayant procédé à son arrestation et les circonstances précises qui ont permis son extradition vers Alger.

Algérie Part a pu confirmer au cours de ses investigations que Slimane Bouhafs a été contacté et approché par les services du renseignement extérieur algérien afin de lui proposer une médiation avec la direction du « MAK » chapeautée par Ferhat M’henni. Selon nos informations, Slimane Bouhafs a échangé régulièrement avec plusieurs intermédiaires dépêchés par les services secrets algériens. Il semble enfin qu’il ait été piégé et s’est retrouvé ensuite interpellé et conduit manu militari vers l’Algérie.

Selon plusieurs sources tunisiennes, il a été kidnappé de son domicile sis à Hay El Tahrir, dans la capitale Tunisienne, par trois individus en tenue civile qui étaient à bord d’une camionnette portant une immatriculation étrangère (non tunisienne). Slimane Bouhafs était installé en Tunisie depuis août 2018, où il a obtenu un statut de réfugié politique du bureau du HCR à Tunis. Cette opération a été décidée et planifiée avec l’accord et complicité des autorités algériennes, certifient nos sources. Ce qui confirme en dernier lieu la thèse du « deal » conclu entre les deux pays pour traquer et s’échanger leurs opposants respectifs.

Pour rappel, en Algérie, Slimane Bouhafs avait été interpellé le 31 juillet 2016 et accusé d’«offense à l’islam» et d’«atteinte à l’image du prophète». Il a été condamné pour «sa foi chrétienne» à «trois ans de prison ferme». Il a quitté la prison algérienne en avril 2018, avant de se réfugier en Tunisie.

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