Bébés morts à Chambéry : cinq questions sur les poches de nutrition

Comment une bactérie a-t-elle pu contaminer des poches alimentaires destinées à des nourrissons ? Les autorités sanitaires ont réquisitionné un laboratoire de l’Institut Pasteur, à Paris, pour identifier les dysfonctionnements à l’origine de la mort, en décembre, de trois nourrissons à l’hôpital de Chambéry (Savoie).

Alors que le laboratoire Marette a reconnu, lundi 6 janvier, avoir fabriqué les poches incriminées, rien n’indique que ce fournisseur soit impliqué dans la contamination. En attendant que les responsabilités soient précisées, francetv info vous explique le parcours des « poches de nutrition parentérale », de leur fabrication à leur utilisation.

A quoi servent ces poches ?

Les poches alimentaires sont utilisées dans les hôpitaux pour nourrir les bébés prématurés, de trop faible poids à la naissance ou malades. L’alimentation parentérale (par perfusion intraveineuse) est une technique de nutrition adaptée aux prématurés, car le système digestif de ces derniers n’est pas assez mature pour recevoir une alimentation classique. Les poches viennent donc remplacer le cordon ombilical de la mère.

Que contiennent-elles ?

Les poches apportent des micro et des macro-nutriments essentiels à la croissance de l’enfant. Elles permettent de lui fournir des apports en eau et en énergie, notamment sous forme de glucose (sucre) et de lipides (graisses), avec certaines restrictions. Cette nutrition peut aussi inclure des éléments azotés (acides aminés existant dans les protéines), des vitamines, des oligo-éléments (zinc, fer, cuivre…) et des minéraux (calcium, sodium, potassium…). Tout est question de dosage.

« On prescrit, pour chaque enfant, de manière particulière, une parentérale adaptée à son poids, à sa pathologie et à son état clinique du jour », explique à France 2 le docteur Odile Becquet, qui dirige le service de néonatologie de l’hôpital parisien Robert-Debré. Même fonctionnement au CHU de Nîmes : « Tous les matins, les médecins prescrivent par informatique les poches de nutrition » destinées à une dizaine de nourrissons, indique à Midi Libre la pédiatre Joëlle Dendale.

Comment sont-elles utilisées ?

Le contenu des poches alimentaires est administré aux nourrissons par perfusion par voie « centrale » : un cathéter est placé, sous anesthésie générale, dans une grosse veine de la base du cou, qui se jette dans le cœur, comme le montre cette vidéo de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille.

La poche est changée tous les jours et placée dans un emballage opaque, car elle craint la lumière. Une surveillance (hydratation, rythme cardiaque et respiratoire, évolution du poids…) est nécessaire durant l’alimentation parentérale, pour parer à tout déséquilibre.

Qui les fabrique ?

« Dans les CHU, les pharmacies hospitalières disposent d’unités de préparations parentérales pédiatriques », qui préparent les poches et fournissent parfois plusieurs hôpitaux, explique au Monde le professeur François Chast, chef du service de pharmacie du groupe hospitalier Cochin-Port Royal-Hôtel Dieu et Broca, à Paris. Cette fabrication en interne permet de « disposer de poches de nutrition personnalisées pour chaque nouveau-né ».

A défaut de pharmacie, ou lorsque celle-ci ne fonctionne pas (week-ends, jours fériés…), certains hôpitaux font appel à des laboratoires privés. Il en existe deux en France : Fasonut et Marette. Ce dernier, situé à Courseulles-sur-Mer (Calvados), est le fournisseur de poches alimentaires de l’établissement de Chambéry.

Quelles sont les précautions prises par les hôpitaux ?

Les prématurés étant des patients particulièrement fragiles, très sensibles aux infections, les précautions sont nombreuses. « Nous faisons tout pour maintenir une sécurisation absolue », assure François Chast, quand sa collègue de Nîmes Joëlle Dendale évoque une « sécurité maximale ». Le matériel et les matières premières sont stérilisés et des contrôles sont effectués en pharmacie et dans les services de réanimation.

« Avant que les règles de surveillance se soient imposées, c’est-à-dire il y a plus de vingt ans, il y a eu des contaminations, je m’en souviens, mais récemment, non », affirme à Libération le professeur Pierre-Henri Jarreau, chef du service de néonatologie de l’hôpital Cochin-Port-Royal, à Paris.

« Malheureusement, comme pour toute activité humaine, nous ne pouvons jamais être à l’abri d’un pépin », reconnaît son confrère François Chast. Des dysfonctionnements sont possibles à chaque étape (composition du contenu, scellement de la poche, transport, conservation, pose de la voie veineuse et perforation de la poche).

Dans le cas de Chambéry, la bactérie à l’origine des décès, que l’on retrouve habituellement dans le tube digestif, est extrêmement rare, explique Jean-Daniel Flaysakier, médecin et journaliste santé à France 2.

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